Coups de cœur 2023 : musiques électroniques

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Pas de suspense, le meilleur album électro de 2023 et l’un des meilleurs albums tous genres confondus selon moi, est Hit Parade de Roisin Murphy. Celles et ceux qui fréquentent la médiathèque le savent déjà, c’est une de mes chouchous, alors quand elle nous présente la meilleure sortie de sa carrière, c’est sûr que je ne vais pas lésiner sur les superlatifs ! Il y a 13 titres numérotés de... 1 à 13. Autant dire 13 petits chefs-d’œuvre à écouter de nombreuses fois tant la magie qui s’en dégage opère longtemps. Après avoir exploré le disco dans un album ultra solaire en 2020, l’artiste investit la soul et le funk avec une facilité de surdouée. Construits avec l’Allemand DJ Koze, la plupart des titres sont minimalistes, personnels, charnels. Disque très actuel ancré dans son époque et à la fois différent de tout ce qu’on peut entendre. Roisin Murphy arrive à toucher du doigt une manière de créer des bombes musicales et prend le chemin réservé à celles et ceux qui deviennent des icônes.

2023 c’est aussi l’année de la révérence du patron. En effet, Laurent Garnier à sorti le bien nommé 33 tours et puis s’en vont, censé être le dernier album de sa carrière, huit années étant passées depuis son dernier album solo. Cet album techno est un vrai album de techno, fait par un musicien passionné hors pair connu pour sa générosité sans limite. Véritable légende et pionnier français de la musique électronique, Laurent Garnier sort à cinquante-sept ans, une galette qui va tourner dans les soirées clubbing les plus tendances et dans les warehouses les plus underground, et ça c’est un véritable tour de force.

Il y a un peu de Laurent Garnier dans French 79, c’est indéniable. La musique de Simon Henner se retrouve dans Teenagers, plus nostalgique et onirique grâce à de nombreuses mélodies rondement trouvées. À écouter frénétiquement.

Agar Agar est un duo qui nous avait plutôt marqué avec l’album électro-mélancolique The dog and the futur. Ils continuent de nous surprendre avec Player, no player. Développé en France depuis 5 ans par Jonathan Coryn, Player no player est un titre original qui traite du deuil et de l’intimité à travers un jeu surprenant. Un projet connecté à l'album d'Agar Agar qui a écrit ses douze nouveaux titres comme la "bande son" de l'aventure, le joueur débloquant des musiques interactives au fil de l'exploration d'une île mystérieuse. Pour donner vie à cette expérience visuelle et sonore immersive, Armand Bultheel mêle dans des atmosphères en constante mutation la musique contemporaine et les étrangetés sonores de jeux vidéo d'antan, les ovnis percussifs, les beats électro variés, les nappes irréelles de synthés pop cosmiques et psychédéliques tandis que la voix de Clara s'élève, soulful et envoûtante. Autant dire un véritable album concept.

Ecouter Ola de Geins’t Nait, Scanner et Petitgrand est une expérience en soi. Un voyage intérieur électro sensoriel contemplatif, méditatif et psychotrope. Je vous conseille grandement l’écoute de la troisième piste sobrement intitulée "Gilles", le titre étant simplement la superposition d’un discours de Gille Deleuze sur l’abrutissement des masses par le contrôle de l’information sous la forme de communication et de différentes couches sonores passives-agressives expérimentales et industrielles. Le reste de l’album m’évoque la visite d’une installation temporaire au Berghain, club techno culte de Berlin, pendant la période de Covid, c’est à dire une accumulation de sons évoquant un espace clos souterrain dystopique et étouffant avec son lot de vibrations, de bruits métalliques et d’ondes protéiformes. Le tout ayant l’étrange avantage d’être écoutable et apaisant.

 

Jérémy, janvier 2024